Styliste des corps et du noir et blanc, Mapplethorpe commence sa carrière d’artiste au début des années 1970, jusqu’à sa mort prématurée due au sida à la fin des années 1980. Le Grand palais lui consacre une rétrospective du 26 Mars au 13 Juillet 2014
La première image est splendide. L’artiste face à la mort en 1988, regardant le regardeur. Il est légèrement flou, une cane au pommeau en forme de crane à la main, elle, bien nette.
L’observateur commence à errer, il constate que, en effet, le travail de Mapplethorpe est à la fois varié et obsessionnel, qu’il suit une ligne esthétique précise, qu’il scrute la chair et travaille à la figer, à la tirer vers autre chose sans jamais s’en abstraire.
En observant les spectateurs dans l’exposition du grand palais on constate que peu de gens s’arrêtent vraiment devant les images. Tout le monde, déambule, on dit « c’est beau », on lit les citations, illustrées de manière ultra scolaire par l’accrochage des photos, et oui, « ça colle ». Mais malheureusement, on ne voit pas grand chose.
L’expo est un peu la continuation des pages « lifestyles » des magazines de mode. On ne voit pas, on constate. On constate que Mapplethorpe a une fascination pour les corps, pour les contrastes, masculin-féminin, peau blanche-peau noire… Mais l’exposition ne donne jamais à voir. La muséographie étale sur un circuit en U surplombé d’une lumière rose hideuse, un parcours décroissant de l’œuvre du photographe, commençant donc par sa mort et se terminant par ses premiers polaroids. Cette volonté de défaire quelque chose d’une image parfaite – inspirée par les grandes maîtres de la renaissance – en remontant le temps, tourne très vite au schéma presque directif, n’ayant pas grand chose à nous dire des œuvres elles-mêmes, se contentant de les aligner les unes après les autres sans réelle proposition.
Trop d’œuvres, trop de matraquages quasi publicitaire des thèmes esthétiques de Mapplethorpe, pas assez de vie – les images sont étouffées –, pas de mise en perspective. Le pire étant peut être le mur des portraits, accrochés les uns par dessus les autres, histoire de nous dire « regardez il a pris des gens connus en photo » avec Warhol au milieu, bien évidemment. Tout comme cette salle +18 ans, étrange trahison du mince propos qui tendait à nous montrer un artiste ne faisant aucune différence entre un sexe et une fleur. Sur les murs noirs de cette petite salle sont accrochées diverses images érotiques, pornographiques, dont la célèbre du « fouet dans le cul ». Des écarts dans l’ouvre du photographe qui ne font à priori pas partie de cet aspect figé de la chair qu’il tente de capturer d’année en année. Encore un exemple de ce trop plein d’œuvres sacrifiant le sens de l’exposition et malheureusement des photos elles-mêmes qu’on ne sait plus comment regarder.
Le parcours se termine par une œuvre très intrigante, trois polaroids d’un siphon de baignoire, dont l’un avec des fleurs s’apprêtant à être aspirées par le trou. Ces trois pauvres photos sont accrochés seules au milieu d’un mur, faisant suite à une série de portraits polaroids. Nous n’en saurons pas plus. Encore un exemple de ce qui fait l’échec de l’exposition, une manière de penser que pour qu’une rétrospective monographique soit rentable il faut qu’elle en montre le maximum. Mais il faudrait réellement se poser la question du regard sur ces œuvres, car les premiers donnant l’impression de ne pas réussir à bien les voir sont les commissaires de l’exposition.
Exposition Robert Mapplethorpe au Grand Palais – Du 26 mars au 13 juillet 2014
Note: