Les blockbusters se suivent et se ressemblent souvent. Bryan Singer, à l’origine de l’adaptation pour l’écran du comic X-Men, reprend la casquette de réalisateur pour ce qui constitue pas moins que le cinquième opus de la série, auquel il faut ajouter deux spin-off consacrés au personnage de Wolverine.
Avant de parler du film en lui-même, on peut se demander pour combien de temps encore les majors vont continuer d’épuiser la manne des comic-books. Depuis les années 2000, avec des productions telles que Spider Man ou justement le premier X-Men, ils ont assis leur hégémonie sur la production de grand spectacle à Hollywood, au côté de l’adaptation de sagas du type Harry Potter ou Hunger Games. Avant d’être déclinés en suites à l’infini : spin-off, reboot, etc. Voilà qui porte à s’interroger sur la capacité de l’industrie cinématographique américaine au renouvellement, à la création des nouveaux récits et à l’ouverture sur de nouveaux imaginaires, au delà de la mise au goût du jour de héros déjà vus et revus.
Une fois ceci dit, ne nions pas que ce nouvel épisode de X-Men possède nombre d’atouts et de charme. Pourtant, il commence plutôt mal. Nous sommes dans le futur. Désignés comme ennemis à éradiquer par les hommes, les mutants sont pourchassés par les Sentinelles, des robots géants à la redoutable efficacité, programmés pour les tuer. La solution trouvée par Magneto et le professeur Xavier : envoyer Wolverine dans le passé, en plein cœur des années 70, afin d’empêcher les crimes commis par des mutants qui les feront désigner comme bouc émissaire des humains.
Les premières séquences sont trop riches en scènes d’action et ne prennent pas suffisamment le temps de caractériser les nouveaux venus inconnus d’un public qui ne connaîtrait pas le comic. Ainsi, condamnés à s’agiter en tous sens, à l’image d’Omar Sy dont la présence s’apparente plus à de la figuration et planté dans une esthétique futuriste pas très convaincante – en tout cas fort déjà vue – ces nouveaux personnages peinent à intéresser.
Heureusement, le film gagne en intérêt passée l’introduction, dès lors que Wolverine, renvoyé dans le passé, retrouve le professeur Xavier jeune et d’autres figures familières telles le Fauve, Mystique et Magneto. Le film, bien que riche en scènes d’action, prend vraiment le temps de développer le caractère de chaque personnage et il faut dire que les acteurs – James McAvoy en tête – jouent de leur charme au maximum. Days of future past prend dès lors des allures de film de potes, aussi convaincant pour ses scènes de pétarade et de bagarre que pour sa maturité dans le portrait des liens d’amitié, de rivalité et de solidarité entre les différents mutants. Bref, du blockbuster qui prend le temps de ménager toute sa place à l’humain (si l’on peut dire, du moins à l’humain dans le mutant). Moment mémorable : l’ensemble de séquences consacré au personnage de Quicksilver, un mutant capable de se déplacer à la vitesse de l’éclair, dont une qui brasserait la dilatation du temps à la sauce Matrix au dessin animé de Chuck Jones..
X-Men, Days of future past lorgne vers un univers pop, brassant de manière ludique des éléments de la grande histoire à la fiction et au mythe, à l’image de l’explication farfelue de l’assassinat de Kennedy. Il est surtout exemplaire du cinéma hollywoodien contemporain où ce n’est plus l’impossibilité d’agir qui fait défaut au protagoniste, mais sa toute puissance qui se heurte à d’autres toutes puissances. Le récit naît de l’entrechoc et du duel d’un super-pouvoir avec un autre. Et le héros de s’apparenter de plus en plus à un toon, personnage de dessin animé pour lequel rien n’est impossible. Or aucun personnage ne cumule tous les dons (métamorphose, transformation, capacité de déplacement illimitée, etc.), ce qui captive alors, c’est comment les pouvoirs respectifs des différents héros peuvent, soit s’additionner pour faire équipe, soit s’annuler quand il y a conflit.
Une fois tout ceci dit, les questions du début persistent cependant : qu’est-ce que ce cinéma peut offrir de nouveau à l’avenir ? Qu’est-ce que les super-héros et autres mutants ont de neuf à nous dire sur nous autres humains ? Dans ce cinéma de grand spectacle, Gravity constitue une belle réponse, car il montre un personnage opérant la reconquête de son corps et de son mental par les seuls moyens d’un banal être humain.
X Men : days of future past, en salles le 21 mai
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