Avec Marie-Francine, Valérie Lemercier livre une comédie sociétale pétrie de personnages truculents mais se laisse aller à un cinéma un peu daté et simpliste malgré son sujet.
Marie-Francine (Valérie Lemercier) a 50 ans.
Plus vraiment à sa place dans son boulot de chercheuse, elle voit débarquer son quinqua de mari (Denis Podalydès) un soir de pot entre collègues qui sonne comme une ritournelle.
« Rien de grave, je suis tombé amoureux, Marie-Francine. Plus que jamais il faut que je sois en forme, elle a 32 ans !! » lui assène-t-il avec la normalité naïve du nouveau bienheureux de la classe moyenne du 21ème siècle.
Les cadres explosent, les schémas périclitent, la vie n’est plus un long fleuve tranquille, semble nous dire la réalisatrice Valérie Lemercier.
La crise de la quarantaine se transforme en crise permanente qui n’a plus d’âge dès lors que la vie vous rattrape dans ses moindres aléas. Les parcours se vivent en sinusoïdale et l’idée d’une trajectoire rectiligne appartient au passé.
Il y a beaucoup d’Etienne Chatiliez dans cette comédie féroce et sociale. Pour le meilleur et pour le pire.
Le meilleur, c’est sans doute le talent de Valérie Lemercier à croquer des personnages en quelques coups de pinceau avec précision et dès leur apparition.
Ses parents (Hélène Vincent et Philippe Laudenbach), auprès desquels Marie-Francine se réfugie au bord de la crise de nerfs, campent un couple néo bourgeois à la retraite du XVIème arrondissement parisien qui a abandonné l’idée même de libido mais pas ses principes d’éducation infantilisants et militaires.
Miguel, prince charmant et cuistot reconverti (Patrick Timsit), qui débarque dans cette boutique de cigarettes électroniques que tient Marie-Francine comme un pis-aller à sa dépression, s’est lui aussi fait larguer par sa femme qui a découvert l’amour avec une autre femme.
Ou encore Nadège (Nadège Beausson-Diagne), aux cuisines avec Miguel, qui vit l’amour avec un policier propre sur lui alors qu’elle est issue des classes populaires embrassées par la mixité.
Avec ces personnages, Valérie Lemercier dresse une cartographie des rapports amoureux dans une France moderne affranchie des barrières de classe et de sexe.
Une certaine idée du mariage pour tous qui rend possible les rencontres amoureuses au-delà de tous les clivages.
Derrière la précision des personnages et de l’écriture, on regrette néanmoins la faiblesse de Valérie Lemercier, cinéaste.
Son film ne parvient pas à donner ce souffle contemporain, ce rythme propre à la nouvelle comédie et cet ancrage si moderne qui nous avait impressionné par exemple dans Victoria de Justine Triet, La loi de la jungle d’Antonin Peretjatko ou plus anciennement Les beaux gosses de Riad Sattouf.
Le film de Valérie Lemercier se trouve donc à l’interstice des comédies populaires, pour ne pas dire populistes, les plus rances (A bras ouverts ou Qu’est qu’on a fait au bon dieu ?) et la nouvelle comédie revigorante et énergisante citée plus haut.
Elle en sort bien évidemment par le haut avec un regard qui la place largement au-dessus de la mêlée.
Mais on ne peut pas oblitérer la déception que l’on ressent devant son film. Ce décalage entre une vision de la société moderne plutôt aiguisée malgré quelques facilités et un film dans sa fabrication qui a déjà été vu mille fois.
Néanmoins, après le naufrage de 100% Cachemire et le demi-échec de Palais Royal, Valérie Lemercier nous offre plutôt une bonne surprise au regard du peu d’attente que suscitait son nouveau film.
Note: