Première réalisation de Piero Messina, L’attente fût écrit en quatre ans, fruit d’un projet qui germa lorsque le sicilien quitta l’école. Après que ce dernier fit ses armes au travers de nombreux court-métrages, en télévision ou en tant qu’assistant-réalisateur aux côtés de Paolo Sorrentino, il décida de s’y consacrer en tant que premier long-métrage. Et, si ce début de carrière bien sage et peu emprunt de folie lui permet de nous offrir un film à la réalisation sans tâche, peut-être fait-il figure de symptôme, chez un jeune cinéaste un peu trop appliqué et dont chaque plan ne semble se présenter qu’en démonstration de sa volonté de bien faire.
Chez Piero Messina, tout est en effet délicat et maîtrisé, des cadres à l’obsession géométrique récurrente aux lumières qui, pour ne jamais s’opposer au décor et au temps, semblent, en extérieur, n’avoir jamais peur de se montrer dissonantes, dé-saturant un bitume qui ploierait sous de menaçants nuages pour mieux chauffer les façades de ses villas de Sicile.
Le manque de tumulte de cette pièce dont l’unique défaut plastique réside en ses voyantes coutures se propose alors d’être compensé par un face à face, celui de deux actrices, que le cinéaste a choisi françaises et que deux générations séparent. L’attente est donc celle de Juliette Binoche, campant une mère de famille mutique et endeuillée, et de Lou de Laâge, belle-fille débarquée de France en plein malaise. Toutes deux attendront plusieurs jours le retour de Giuseppe, amour commun dont il est évident qu’il ne reviendra pas. D’omissions en non-dits, de non-dits en mensonges, les deux femmes refuseront d’affronter cette pesante réalité, les séparant autant qu’elle devra les rapprocher.
Si les deux comédiennes s’avèrent convaincantes dans ces rôles très arrêtés, le manque de substance d’une histoire – qui pouvait difficilement s’appesantir au-delà d’un moyen-métrage – leur permet difficilement d’exploiter la vaste palette de leur jeu. Par délicatesse, Messina choisit de leur éviter tout éclat, frustrant ceux parmi nous qui avaient aimé subir la folie de Lou de Laâge, dans Respire (de Mélanie Laurent), et n’avaient d’autre hâte que de continuer à la découvrir.
L’émotion, toutefois, finit par sonner juste lorsque s’achève ce face à face et, si elle n’emporte pas totalement, confère tout de même à ce premier film une dignité prometteuse, peinant à transformer l’exercice, mais forçant à l’admettre comme réussi. A l’image de sa conclusion, ne manquant pas d’un certain onirisme, nous devrons alors, et à notre tour, prendre le temps de distinguer le factuel de la foi, ce long-métrage un peu faible, d’un cinéaste plein d’espoir.
Sortie le 16 décembre 2015
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