Scott Frank signe avec Balade entre les tombes son deuxième long-métrage. Il a principalement œuvré à Hollywood en tant que scénariste, notamment de Minority Report de Steven Spielberg. Cet opus est quant à lui essentiellement porté par Liam Neeson : cela fait quelques temps maintenant que l’acteur a délaissé les rôles de grand gentil (La Liste de Schindler, Star Wars) pour jouer le bad guy, créant une certaine fidélité du public sur ce personnage : il y a à présent des « Liam Neeson movies ». Ce Balade entre les tombes, toutefois, vaut quand même mieux qu’une simple série de démonstrations de force musculaire à la sauce Taken.
Le héros Matt Scudder, personnage issu d’une série de roman crée par Lawrence Block, est un ancien flic reconverti en détective privé. Il est engagé par un mafieux pour enquêter sur le meurtre de sa femme, retrouvée découpée en morceaux après paiement d’une rançon.
Le film commence par montrer les événements qui ont coûté sa carrière de policer à Scudder, bien des années auparavant, et qui lui pèsent toujours sur la conscience. Alors alcoolique, il décima des braqueurs infiltrés dans le bar où il prenait sa collation matinale.
Après ce début pétaradant, commence un film étrange : loin de jouer des muscles et de tirer des coups de feu à tout va, Scudder mène l’enquête, et fait la rencontre d’un jeune garçon, TJ, hébergé en foyer, auprès de qui il va jouer les pères de substitution. Balade entre les tombes intéresse dans la mesure où il reconstitue le New York des années 90, alors que la fascination s’est plutôt exercée ces derniers temps sur les années 70 ou 80, que ce soit dans le polar ou ailleurs (Zodiac, Drive, etc.). Le film possède donc une relative originalité et joue une partition nostalgique. En portant son choix sur cette époque où l’on communiquait encore par cabines téléphoniques, le scénario fait à la fois preuve de paresse à tenter de montrer une enquête policière à l’heure des nouvelles technologies, tout comme il joue l’atout de la séduction old school. Scott Frank s’en sort alors avec les honneurs, il accroche à l’évolution de l’intrigue, brosse le portrait réussi d’un quartier new-yorkais, sans oublier d’accorder une place dans le récit à la relation qui s’établit entre Scudder et le jeune TJ.
Hélas, c’est une violence grand-guignolesque qui prend le dessus dans la dernière partie. Alors que les autres personnages sont remarquables par leurs nuances, les ravisseurs sont outranciers et caricaturaux. Le film se fait de surcroît l’apologue d’une morale douteuse : difficile de ne pas voir dans la façon dont les protagonistes refusent d’envoyer les tueurs aux tribunaux pour user à leur encontre d’une justice expéditive un moyen de justifier des scènes de violence sanguinolentes. Pire, l’intrigue révèle en cours de route que Scudder ne tire pas sa culpabilité du fait d’avoir dézingué les braqueurs du bar sans autre forme de procès, mais à cause d’un accident collatéral qui causa des dommages à un individu innocent. Une pilule dure à avaler, et qui vient gâter le plaisir pris à l’efficacité honorable de ce modeste polar.
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