Lorsqu’on regarde un film d’épouvante, la séquence d’ouverture est comme un apéritif donnant un avant goût de ce qui nous attend. Elle ancre l’ambiance, l’atmosphère et le ton du long-métrage. Elle demeure donc primordiale, véritable indice scénique. On se souvient par exemple du prologue d’Halloween de John Carpenter où le jeune Michael Myers assassine brutalement sa sœur à travers un effrayant plan subjectif teinté de musique aux arpèges acerbes. Dario Argento nous le prouvera également avec l’ouverture de Suspiria où déferle une multitude de couleurs et de matières ; nous présentant un meurtre chorégraphié et élégant aussi sordide qu’esthétique. Wes Craven nous le confirmera avec l’introduction de Scream où nous assistons, impuissants, aux appels téléphoniques du tueur ayant pris pour cible une jeune blondinette qu’il va harceler avec perversité et insistance, créant une tension palpable et une atmosphère malsaine. Plus récemment, nous pouvons même citer la séquence d’ouverture du très déroutant It Follows (présenté à l’étrange festival 2014) où la mise en scène alterne intenses travellings et panoramiques effrénés, créant un climat incertain où le visible autant que l’invisible est craint. Pour Emelie, il n’en sera hélas rien. Et si les premières minutes annonçaient une œuvre inquiétante et plaisante, le récit s’essoufflera aussi vite qu’une glace fondant sur son cornet et collant à nos doigts.
Dan et Joyce fêtent leur treizième anniversaire de mariage. Afin de pouvoir papillonner au restaurant, ils font appel à une baby-sitter pour garder leurs trois enfants (et accessoirement un serpent). Mais peut-on réellement se fier à cette dénommée Anna ? Un scénario vieux comme le monde, mais dont on se délecte à l’avance. Et il faut avouer que la première partie du film nous offre quelques éléments intéressants. Le réalisateur parvient à faire naître une ambiguïté certaine sur l’attitude de la jeune femme et le malaise s’installe, contaminant notre regard, abreuvant nos angoisses. Vient alors une séquence où Anna demande à un enfant de lui ouvrir un tampon avant de se l’introduire devant lui. Puis celle où elle fait regarder aux enfants, une cassette VHS des ébats sexuels de leurs parents. Le climat se fond dans une ambivalence obscure qu’on aimerait voir évoluer. Il sera pourtant avorté par un twist qui arrive bien trop tôt, nous dévoilant d’un même reflet l’identité de la baby-sitter et ses intentions macabres.
Emelie se discrédite, la mise en scène qui suivra deviendra clinique, fade, sans réelle étincelle et se résumant à des courses poursuites dans le noir. Qui plus est, des mauvaises courses poursuites dans le noir. Privés de cette frêle intensité qui commençait à se dégager durant la première partie du film, nous restons passifs, désabusés et sans aucun doute, cruellement frustrés.