Quand Alela Diane est apparue dans le paysage musical il y a trois ans avec «The Pirate’s gospel», son premier album, elle a réussi à convertir au folk ses réfractaires les plus farouches : ceux qui juraient ne jamais écouter cette musique de culs terreux à santiags. Il faut dire que sur cet album exclusivement acoustique, la chanteuse s’affranchissait du folklore classique dans une formule guitare/voix des plus subtiles et d’une beauté céleste.
Une musique qui puise dans les racines d’une terre de légendes, qui redonne vie aux anciens. Elle a quelque chose d’ancestral, transmis de génération en génération, qui glorifie la nature et les choses simples. On imaginerait parfaitement Alela Diane dans sa cabane en bois, près d’un feu, jouant ses magnifiques balades à la guitare comme on récite des contes aux enfants, de sa voix sublime et profonde. Une musique qui vient de la terre, mais pas terrienne, qui se hisse vers les cieux.
La dernière fois que l’on a vu Alela Diane en concert, c’était à Strasbourg, dans la salle de la Laiterie, en avril 2009. Elle y était déjà entourée d’un groupe et jouait en famille, puisque son compagnon dans la vie et son papa l’accompagnaient à la guitare. C’était à l’époque de son deuxième album, «To be still» et on regrettait déjà tout ce petit monde sur scène, qui se soumettait davantage aux codes du folk traditionnel, plus électrique. Les morceaux autrefois si aériens retrouvaient la force de l’attraction terrestre, la terre collait aux bottes. C’est sur la route, pendant cette tournée, que la chanteuse a composé ses nouveaux titres, avec ces musiciens. Il ne faut certes pas généraliser, mais on a tendance à se méfier des albums de tournée, surtout pour une artiste comme Alela Diane, dont la musique est liée si intimement à son lieu de vie, son univers, plutôt qu’à l’énergie de la scène. Scott Litt a enregistré ces morceaux à l’issue de la tournée, à Los Angeles. Pas forcément quelqu’un qui travaille dans la dentelle : il a produit Nirvana et R.E.M.
Contrairement aux précédents albums, ce troisième opus sort sous un nom de groupe : Alela Diane & the Wild Divine, signe d’une véritable rupture musicale avec ses deux précédents disques solos. Ce sont ses fidèles musiciens qui montent sur la scène du Bikini le 23 octobre, dernière date française de la tournée, pour jouer un court set d’une heure quinze, résolument orienté vers les titres du dernier album éponyme… Au point de faire des impasses sévères sur des morceaux essentiels comme «The pirate’s gospel», un oubli d’autant plus fâcheux que les nouvelles chansons ne sont pas des alternatives avantageuses, folk songs ordinaires et banales, à la section rythmique convenue, que la voix toujours impériale de Alela Diane ne parvient pas à hisser au niveau de ses deux premiers albums. On préfère quand elle joue seule, ou accompagnée de son père, sans électricité, «Tatted Lace» ou «Oh my mama». Dans ces moments-là, on retrouve la magie des débuts hélas absente de la musique qu’elle joue désormais.
Note: