Inquiets nous étions de l’avenir de Pixar après un Cars 2 de sinistre mémoire, première véritable sortie de route du studio qui renonçait à s’adresser simultanément aux public jeunes et adultes pour privilégier une lecture strictement enfantine des aventures de Martin, dépanneuse maladroite et stupide. L’effet était garanti sur nos progénitures qui ne se lassent pas des quiproquos et des catastrophes en chaîne provoquées par ce personnage hystérique et horripilant, interdisant le second degré de lecture qui faisait la force de Pixar, pour réduire sa mythologie à sa portion la plus congrue. Inquiets également par ces annonces de séquelles, Monstres & Cie 2, Le Monde de Nemo 2, preuve manifeste de l’incapacité du studio à renouveler son univers, à l’ouvrir à de nouveaux genres, des personnages inédits.
Pas franchement optimistes non plus à l’idée que le seul film à ne pas s’inscrire dans une franchise existante soit un «film de princesse». Affirmation de la mainmise de Disney sur les créatifs de Pixar ? Pas très rassurant d’apprendre le production hell qu’a traversé le tournage de Rebelle, la réalisatrice initiale, Brenda Chapman (tout de même créditée au générique) ayant été débarquée en cours de route au profit de Mark Andrews. L’imaginaire de la firme à la lampe allait-il se dissoudre dans celui de Blanche Neige, Raiponce, Mulan et Cendrillon… ? Au vu du résultat, on serait tentés de répondre par la négative, même si l’exercice ressemble fort à un compromis, tiré vers le haut, certes, par une qualité d’écriture jamais en berne et par un niveau d’animation qui laisse bouche bée d’admiration.
Merida est donc le premier personnage principal féminin de l’histoire de Pixar et c’est une jeune princesse écossaise qui a soif d’aventures et de grands espaces. Elle refuse le destin qui lui est promis par sa mère, de faire un mariage de raison avec le descendant d’un autre clan qui permettrait de maintenir la paix du royaume. Pas de surprise, nous sommes sur le modèle classique du récit d’apprentissage, avec les motifs traditionnels qui sont induits : le désir d’émancipation face aux traditions et à la pression familiale, le destin tout tracé que l’on voudrait contrarier en faisant ses propres choix de vie, les erreurs dont on apprend… Si le film permet à Merida de bouger les lignes de force qui s’imposaient à elle et en font une vraie héroïne au caractère bien trempé, la morale demeure in fine quelque peu conservatrice. Oui, la jeune princesse parvient à alléger le poids de traditions ancestrales voulues par sa mère, pourtant au bout de l’aventure, ce n’est pas le message de féminisme triomphant qui prévaut, mais plutôt celui d’un compromis mutuellement consenti.
Si sur le plan du récit et de la morale, Rebelle est plutôt convenu et prévisible. On ne peut nier en revanche une réelle efficacité dans la caractérisation des personnages – y compris parmi les seconds rôles qui donnent une belle ampleur à l’histoire -, un humour qui fait souvent mouche même chez les plus de sept ans, une émotion souvent présente et surtout, une animation qui laisse très loin derrière une concurrence à la traîne. Pixar reste toujours aussi impérial, que ce soit dans les décors somptueux des Highlands écossais, le détail des textures ou encore la fluidité des mouvements des personnages. C’est réellement magnifique, proche du photo réalisme, mais avec cette touche de poésie et de merveilleux qui insuffle au film une ampleur mythologique propre aux contes. Alors certes, on n’atteint pas les sommets de la filmographie de Pixar (Toy Story, Wall E) aux enjeux autrement plus ambitieux, mais étant donné notre niveau d’attente initial, ne boudons pas notre plaisir et envisageons l’avenir du studio avec optimisme.
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