Il en va du cinéma comme de la littérature : l’incipit a son importance, il annonce ce qui va suivre, pose le ton, définit le style. A puerta fria semble ne pas avoir été conçu par rapport à son ouverture (banale), mais au contraire pour son climax, une séquence ici située dans le dernier acte du film. Salva est un représentant de commerce qui compte trente ans de métier. Il a vu ses collègues se faire licencier pour absence de résultats et lui-même doit signer un gros contrat pendant un salon professionnel ou alors il perd son travail. Pour réussir à accéder à un gros client, il s’adjoint les services d’une jeune hôtesse d’accueil, Inés, qui va l’aider. LA scène attendue est celle de la transaction, entre Salva, Ines qui joue l’intermédiaire et assure la traduction, et Battleworth, l’acheteur qui n’est autre que Nick Nolte, c’est dire l’aspect quasi mythologique que revêt le personnage. Alors qu’il s’apprête à valider une commande historique, Battleworth émet une condition qui pose un cas de conscience, une question de morale que le film ne tranche malheureusement pas.
On reste un peu sur notre faim, A puerta fria met du temps à poser son cas de conscience et nous laisse sans chercher à le résoudre. On se souvient de Glengarry Glen Ross et de Mort d’un commis voyageur qui se situaient dans le même environnement et qui allaient au bout de leur sujet. Xavier Puebla filme ce monde dans une ambiance nostalgique et funeste, ses VRP ont l’air de fantômes tout droit sortis de l’hôtel Overlook de Shining. L’inanité de la fonction est largement signifiée par le lapsus Battleworth (littéralement, «qui vaut bien une bataille») que Slava prononce Butterworth («qui compte pour du beurre»). Salva et Ines lient une relation filiale qui renvoie au premier la perte de sa fille (les questions sont laissées en suspens). Antonio Dechent et Maria Valvendre (et ses faux airs de Louise Bourgoin) sont tous les deux excellents, mais ils évoluent dans un univers factice sur lequel Xavier Puebla n’apporte pas de vision nouvelle.
Note: