Tourné en quelques semaines entre deux Transformers pour un budget dérisoire de 20 millions de dollars, No pain no gain n’est pas pour autant un interlude récréatif pour Michael Bay. Il signe- là, au contraire, son meilleur opus que l’on serait presque tenté de qualifier de film d’auteur, toutes proportions gardées bien sûr, considérant la filmographie du bonhomme. Le réalisateur de Rock, d’Armageddon ou de Bad Boys est en effet haï par tout cinéphile se réclamant du bon goût, chose dont sont dépourvus tous ses films. Souvent vulgaires, dotés d’un montage épileptique qui interdit à tout plan d’exister plus longtemps qu’un clignement d’œil et d’une photo souvent hideuse, Michael Bay n’aime rien tant que de filmer des soldats au ralenti, des couchers de soleil, des explosions et le cul de Megan Fox. Il n’a aucune notion de durée, de cadre ou de direction d’acteur, le type est un grand gamin pas très finaud qui joue avec ses figurines Hasbro grandeur nature.
Si No pain no gain contient aussi sa dose de crétinerie, elle est ici totalement assumée. On n’a pas pitié de Mark Wahlberg ou Dwayne Johnson, alors que Ben Affleck faisait peine à voir dans Pearl Harbor ou Shia Labeouf dans Transformers. Ce sont bien les personnages du film qui sont navrants de bêtise et non pas les acteurs qui jouent a contrario sur le mode du second degré absurde. L’ex The Rock livre ainsi sa meilleure prestation depuis Southland Tales, toute en naïveté et en béatitude. Le scénario autorise cette forme de cabotinage. Basé sur un fait divers réel, il raconte comment à Miami, trois bodybuilders kidnappent un riche entrepreneur pour lui soutirer tous ses biens. Sauf que le trio tient plus de l’équipe de pieds nickelés que du véritable crime organisé. Michael Bay charge lourdement la barque en termes de caractérisation des personnages et d’improbabilité des situations, si bien qu’en cours de route, un panneau doit nous confirmer une nouvelle fois la véracité des faits.
Le film ne fait pas dans la dentelle et arrose tous azimuts les gays, les juifs, les blondes, les nains, les culturistes, le rêve américain, sans que l’on puisse pour autant l’accuser de glisser vers l’homophobie, l’antisémitisme ou la misogynie primaires. Michael Bay manifeste exceptionnellement un vrai sens du rythme et du découpage avec des scènes d’action pour une fois lisibles et un récit parfaitement cadencé. Il détourne ses propres codes de mise en scène pour les tourner en ridicule, comme le fameux slow motion walk d’Armageddon qui ne signifie plus ici l’héroïsme triomphant de Bruce Willis, mais bel et bien la bêtise sans borne des adeptes du fitness bas du front. On regrette d’autant plus le côté moraliste final, dont le film se serait bien passé, tout comme cette façon de citer Fargo ou Pulp Fiction, trop manifeste pour être tout à fait honnête. Mais même si Michael Bay n’a ni le sens de l’écriture, de l’observation et de la psychologie des frères Coen ou de Tarantino, il faut avouer qu’on en n’attendait pas tant de No pain no gain qui vieillira sans doute mal dans les esprits, mais dont l’impact immédiat est assez redoutable.
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