Depuis le beau succès d’estime rencontré à la sortie de son premier album, Deportivo est passé quelque peu inaperçu ces dernières années. Pourtant, les critiques de la presse étaient plutôt encourageantes et les prestations scéniques engagées et souvent bondées. Le groupe a fait du chemin depuis, puisqu’il sort Domino, son quatrième effort studio, mais premier album issu de son propre label, « Titanic Records », qu’il présente actuellement en tournée.Il a fait halte à la Dynamo de Toulouse. Nous y étions.
C’est en plein milieu de semaine, alors que la pluie régale les passants, que Deportivo pose ses valises dans la ville rose. L’humidité sera vite évaporée puisque la salle de la Dynamo les accueille très chaleureusement. De mémoire, on aura rarement vu un tel public devant la scène. Même les escaliers ne laissaient aucune chance aux retardataires. Il fallait arriver tôt pour espérer prendre de bonnes photos. C’est assez remarquable pour le noter. Deportivo possède une base de fans très active, fidèle et, ce soir-là, à Toulouse, la démonstration en été faite aisément. Aller commander une bière au bar, c’était renoncer définitivement à y voir quelque chose. D’ailleurs, personne ne pouvait réellement être sûr d’arriver en vie jusqu’au serveur !
Il y avait donc tout ce qu’il fallait pour faire de ce concert une grande et belle fête. La première partie, Bellegarde, aura d’ailleurs apporté sa pierre à l’édifice puisqu’il parvient facilement à mettre le public en jambes. Toutes guitares dehors, le groupe fait son effet, il faut le reconnaître, même si on reste assez dubitatif à l’écoute des textes.
Un constat qu’on peut faire aussi pour Deportivo. Mais ces derniers ont développé une stratégie à la fois intelligente et touchante. En effet, Jérôme Coudanne chanteur et leader du trio, revendique et écrit depuis le début des chansons non engagées et qui permettent une large interprétation. Chacun peut finalement y entendre ce qu’il souhaite. Certes, les plus sceptiques le resteront, mais là encore le concert rendra son verdict.
En effet, avec un public assez jeune devant et un peu plus âgé derrière, on a bien du mal à distinguer qui connaît le mieux les paroles. Car c’est important de le signaler, ce concert nous renvoie directement à nos plus belles années de lycée. Le charisme du trio est tel que Jérôme Coudanne, tel un Patrick Bruel dans ses années fastes, n’a même plus besoin de chanter ses chansons. Tout du moins, les plus attendues de la soirée, comme Parmi Eux et La Salade. C’est assez impressionnant de voir et de pouvoir entendre un public entier reprendre en cœur la quasi-totalité, non pas d’une mais de plusieurs chansons.
Le set proposé ce soir-là, sera par ailleurs assez long, presque deux heures, rappel inclus. Deportivo est un groupe généreux à la fois dans l’énergie dégagée, dans la complicité entretenue avec le public et dans la durée de leur prestation. Très rapidement la salle s’agite, les premiers rangs ne tiennent pas en place devant les assauts électriques des guitares. La première partie fera logiquement plutôt honneur à Domino, et Deportivo s’en fera d’ailleurs réprimander. Le public veut entendre les « anciennes »… Il ne sera pas déçu ! De toute façon, les quatre albums auront leur représentation ce soir-là. En passant par la Brise, Les bières s’ouvrent aujourd’hui Manuellement, du second opus, à Ivres & Débutants de l’album éponyme, ou encore par Both On The Same Boat ou En ville du dernier, nous aurons eu le droit à un catalogue quasi exhaustif de Deportivo. Tout cela participera au lancement des slams dans la petite salle de la Dynamo, à la fois du public, mais aussi de Jérôme Coudanne, qui parviendra à monter à l’étage et surtout à en descendre, sans prendre l’escalier ! Il sera d’ailleurs imité plus tard dans la soirée par Julien Bonnet, batteur, qui profitera de son solo au kazoo pour faire un tour en salle. Un véritable concert d’ados !
Bref, ça transpire la joie et l’envie. Le chanteur n’hésite pas à blaguer à plusieurs reprises – annonçant par exemple Tostaky -, fera monter les jeunes filles sur scène en toute fin de concert comme souvent sur leur tournée (pour la plus grande joie de Richard Magnac, le bassiste) et gratifie le public de quelques reprises, dont Be My Baby des Ronettes, souvent jouée.
Deportivo en concert, c’est donc un véritable spectacle, on y adhère quoi qu’il arrive. Même un public qui n’en attend pas grand-chose a priori finit, de fait, par se laisser emporter. Au moins pour la majeure partie du concert. C’est une grande force et on comprend désormais pourquoi ces Français drainent autant de fans.
Ceci étant, si le spectacle est de qualité, il peut également finir par épuiser. On reste aussi un peu sur sa faim, car musicalement parlant, cela semble tourner un peu trop en rond. Faire de la musique quelque chose d’énergique, par moments contrasté par des chansons plus calmes, plus sensibles, même parfois joué en solo, ne suffit pas à se renouveler. On aimerait voir Deportivo pousser de nouvelles portes pour qu’il revienne de nouveau dans la lumière. Le groupe en a pourtant les capacités, et on regrette qu’il n’ait pas encore trouvé les bonnes clés. Ce qui était en 2004 un bon espoir de renouveau du rock français n’est pas parvenu à le devenir tout à fait. Mais ne boudons pas notre plaisir, et espérons retrouver bien vite Deportivo dans les meilleures conditions.
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