Des centaines d’étudiants fébriles, serrés les uns contre les autres dans un amphithéâtre plein à craquer, où l’angoisse est presque palpable : telles sont les premières mésaventures du film Le Concours, réalisé par Claire Simon. Son but : montrer l’envers du décor du concours de La Fémis, l’une des plus célèbres et prestigieuses écoles en termes d’études cinématographiques, dont elle a fait partie pendant plusieurs années. Les candidats sont nombreux, mais les heureux élus seront très rares. Chacun veut tenter sa chance et veut prouver qu’il est plus spécial que son voisin.
La première épreuve est une analyse de séquence, extrait de la série Shokuzai de Kiyoshi Kurosawa. Le noir se fait, tout le monde se tait, et seul le projecteur illumine les visages concentrés des candidats. Le court extrait débute, puis après quelques minutes d’attention, la lumière revient dans le grand amphithéâtre de l’université de Paris X. « Vous avez trois heures, à partir de maintenant. » À leur sortie, les premiers sont nerveux, peu sûrs d’eux. Ils ont donné tout ce qu’ils avaient, mais ont tout de même peur que ce ne soit pas suffisant. Avec discrétion, la caméra s’invite en catimini dans les moments les plus personnels du concours, que cela soit du côté des candidats, comme du côté des membres du jury. À plusieurs reprises, le stress communicatif des étudiants s’immisce chez le spectateur, et on se retrouve rapidement à s’attacher à eux, et à espérer plus que tout qu’ils réussissent. Il est vrai que les profils choisis pour les besoins du film sont attachants, d’autant plus lors de la deuxième épreuve : l’oral. Certains tremblent, beaucoup s’expriment avec difficulté à cause de leur nervosité. Les réactions du jury, une fois le candidat sorti, sont parfois amusantes. Ils ont du mal à recoller les morceaux d’un scénario bancal et créé dans les 45 minutes imposées, et trouvent parfois tel ou tel candidat particulièrement attachant. Ainsi, les coulisses du concours semblent plus humaines. Les notes et décisions tiennent parfois à un fil. Il suffit d’un bafouillage, d’une phrase mal exprimée, ou d’un blocage, pour que le nom soit rayé de la liste. Bien que compréhensifs, le jury cherche avant tout la perle rare, et se doit de pouvoir supprimer des candidats pour des raisons banales. Une seule erreur peut donc être fatale, et les deux parties en sont conscients, ce qui ne fait que monter un peu plus la pression durant les épreuves.
C’est avec humour et émotion que ce documentaire touche au monde fermé de La Femis. La simplicité des plans, l’intimité de certaines scènes, tout est fait avec délicatesse pour ne pas déranger les candidats et les juges en plein travail. Cette école et son concours d’entrée, qui semblent inaccessibles de par leur prestige, sont décortiqués ici sous tous les angles, ce qui rend l’ensemble beaucoup plus humain. Tous les métiers sont abordés : le scénario, la réalisation, mais aussi la production, le son ou encore la distribution. Chacun est présent avec une idée précise en tête et un seul objectif : convaincre le jury qu’ils seront à la hauteur. À la fin de ces deux heures, le film se clôt sur une photo de classe. On y retrouve les rares élus, certains rencontrés dès le début du documentaire, et qui arborent un sourire fatigué mais heureux. Ils ont réalisé leur rêve et ce n’est que le début d’une belle aventure cinématographique pour eux.
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