Avec Sur la piste du Marsupilami, Alain Chabat confirme son talent de grand réalisateur/acteur populaire dans le plus noble sens du terme. En puisant dans les sources d’un «patrimoine» commun unanimement reconnu et apprécié, qu’il s’agisse d’Astérix et Obélix, que de la bande dessinée de Franquin, il réussit à rester fidèle aux univers et aux personnages, tout en en réactualisant les motifs à la faveur d’un humour non-sensesque et absurde dont il est dépositaire, celui des Nuls et du fameux «esprit Canal» qu’il continue de perpétuer envers et contre tout. Ces adaptations sont des réussites à plus d’un titre : elles ne se contentent pas d’animer les cases d’une bande-dessinée de façon systématique sans aucune inspiration, mais insufflent au contraire une dynamique qui respecte le matériau d’origine tout en lui injectant une dose de références à la culture populaire puisée du côté de la télévision, des séries, de la musique, du cinéma de genre.
Ceux qui ont aimé Astérix et Obélix Mission : Cléopâtre seront donc en terrain familier. C’est peut-être un des reproches qu’on pourrait formuler à l’encontre du film : systématiser une formule qui fonctionne sans réel souci de renouvellement. Mais quand la recette est bonne, à quoi bon en changer les ingrédients ?! On sent avec Sur la piste du Marsupilami que Alain Chabat s’est fait plaisir. Les spectateurs les plus attentifs retrouveront le goût de la parodie des Nuls en repérant les références disséminées dans le film, à Avatar, Mission : Impossible, Matrix ou Le silence des agneaux. Mais le réalisateur rend surtout un bel hommage au meilleur du cinéma populaire français des années 60, de De Broca à Zidi en passant par Oury, en réinventant la notion de buddy movie basé sur un duo de cinéma comique, qu’il forme avec Jamel. On sent la complicité entre ces deux-là et le film ne trouve son véritable rythme qu’à partir du moment où ils sont réunis à l’écran…
Ce qui saute aux yeux, c’est le plaisir manifeste que prend l’intégralité du casting. Patrick Timsit semble se régaler dans le rôle du Caporal et que dire de la séquence musicale d’anthologie qui met en scène Lambert Wilson en Général Pochero fan de Céline Dion ! Instantanément culte ! On retrouve d’ailleurs en plusieurs occasions le goût de Chabat pour la comédie musicale, après le James Brown de Mission : Cléopâtre. On ne peut pas en dire plus, le film faisait partie de cette catégorie dont on voudrait raconter les meilleurs moments à ceux qui ne l’ont pas vu, mais qu’on s’abstient de trop dévoiler pour réserver la surprise aux futurs spectateurs.
Quant au Marsupilami, il est techniquement réussi. La campagne de promo avait misé sur le secret en retardant le dévoilement du design de la bête. Le film en revanche ne joue pas avec les effets d’attente, c’est aussi un film pour les enfants, pas questions de différer son apparition à l’écran. Elle arrive dès le générique et elle est convaincante, aussi bien en terme de texture, de mouvement que d’interaction avec les décors et les personnages. C’est une bonne nouvelle qu’un film français puisse intégrer des effets numériques aussi accomplis, mais le plaisir que procure le film n’est pas déterminé uniquement par la réussite visuelle du marsupiale. Elle dépend surtout de la capacité de Chabat à créer un univers en terme de décor, de direction de la photographie, de caractérisation des personnages, et de soutenir un vrai rythme de comédie qui ne laisse aucun répit au spectateur. Palompeu, palombien : Sur la piste du Marsupilami est un vrai plaisir de cinéma, alors à quoi bon le bouder ?!
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