Le film
Mathieu Kassovitz a besoin de sujets forts pour donner la pleine mesure de ses talents de metteur en scène, de conteur et de polémiste. C’était le cas de La Haine, film coup de poing sur le malaise des banlieues et culte de toute une génération, ainsi que d’Assassins, film sur la transmission de la violence et charge au vitriol de la société des médias. Enfant terrible du cinéma français dans ces circonstances, Mathieu Kassovitz sait aussi manifester ses capacités de technicien et ses compétences de réalisateur de divertissements, comme ce fut le cas pour Les rivières pourpres dans le registre du thriller et de Gothika dans celui du cinéma d’horreur. Mais il n’est cependant jamais meilleur que quand il provoque la controverse, suscite le débat. On l’avait laissé moribond à la suite de Babylon A.D., naufrage artistique où il s’est retrouvé piégé entre une relation conflictuelle avec son acteur principal, Vin Diesel et un studio sourd à ses appels au secours. Il y avait pourtant dans le roman de Maurice G. Dantec de quoi permettre un grand film, conte philosophique, technologique, religieux et politique. Mais le pari était sans doute trop ambitieux que de vouloir adapter tous les niveaux de réflexion du livre sur grand écran. (LIRE LA SUITE)
Le dvd
L’ordre et la morale a été un énorme échec public lors de sa sortie en salle en novembre dernier. Terminant sa carrière à 148 000 spectateurs, le film a souffert du raz-de-marée Intouchables sorti deux semaines plus tôt. Dommage pour un film que Mathieu Kassovitz portait depuis près de dix ans, qu’il a défendu à la faveur d’une tournée des avant-premières en province (LIRE NOTRE ENTRETIEN), et qui constitue une des rares incursions d’un cinéma hexagonal osant se pencher sur les heures sombres de son histoire. Peux-être que les événements de la prise d’otages d’Ouvéa sont-ils trop obscurs pour le grand public. Méconnus car éloignés de nous géographiquement et situés dans un contexte politique trouble : la cohabitation, l’entre-deux tours de l’élection présidentielle de 1988. Il suffit pourtant de visionner L’ordre et la morale pour se convaincre qu’au delà du fait divers, son propos touche à une certaine forme d’universalité, et que son impact social et politique est très actuel pour interpeller même ceux pour qui les faits décrits sont inconnus.
Pour un budget initial de 13 millions d’euros, la note a certainement été difficile à avaler pour UGC qui produit le film. Dans une telle situation, la sortie vidéo peut être envisagée de deux façons : soit une sortie « technique » peu coûteuse qui ne prend pas de risque économiquement, soit une édition au contenu plus étoffé qui accompagne pédagogiquement le film, permet de comprendre son contexte et les conditions de son tournage. Il semblerait que l’éditeur n’a pas choisi et propose les deux solutions : un dvd qui ne contient que le film, dépourvu du moindre bonus, et un blu ray qui dispose de deux copieux suppléments. Hélas, c’est le disque test du dvd que nous avons eu entre les mains, exit donc Le dernier assaut, le making of de 65 minutes et Le temps kanak, un documentaire de 57 minutes que nous n’avons donc pas pu voir. Cette politique éditoriale est surprenante : si on comprend que le film et les bonus n’auraient pas tenu sur un seul dvd, on a du mal à croire qu’un second disque était impossible à envisager. Car pour le coup, on revient à la préhistoire du support, quand les éditeurs mettaient sur le marché des disques vierges de tout supplément. La solution est en outre clivante entre ceux qui possèdent le matériel pour lire la haute définition et ceux qui en sont restés à un home cinéma standard.
Reste donc le film, c’est tout de même l’essentiel, dans un transfert qui respecte les choix photographiques et le superbe format 2 : 35, et un mixage 5.1 en Dolby Digital qui n’est pas particulièrement démonstratif, le film reposant essentiellement sur les dialogues. Les percussions des Tambours du Bronx feront tout de même ronfler les caissons de basse et les quelques scènes d’action et bruits d’ambiance animeront les équipements multi-canaux. A noter la présence d’une piste d’audio description, tendance qu’on aimerait se voir davantage généralisée.
Captures d’écran (cliquer pour agrandir)
L’ordre et la morale, un dvd UGC/ Ciné 37 – Dans les bacs
Note: