La ville Portugaise de Guimares a 2000 ans, c’est l’occasion pour que trois réalisateurs de cinéma fassent chacun un court métrage expérimental en 3D, traitant de près ou de loin de cette ville qui les a réunis dans ce projet singulier. Le film réunit donc les frondeurs Godard et Greenaway ainsi qu’un quasi inconnu en France, Edgar Pêra.
Le film s’ouvre sur le court métrage de Peter Greenaway, Just in time. Aucune surprise, le réalisateur à choisi un cloitre, il fait flotter sa caméra dans un univers saturé de surimpressions, d’empilements de sons et de petites actions évoquant des morceaux de l’histoire de ce cloitre et de cette ville. Les propos et indications déroulées littéralement par le film ne retiendront l’attention de personne mais la forme est « sympathique » et l’aspect « manège » fonctionne plutôt bien. Il s’agit de ne pas prendre en compte ce que le réalisateur veut nous dire, mais bien d’inscrire son regard dans ces images gorgées de détails qui fonctionnent mieux en tant que petits éclats formels qu’en tant qu’informations sur le cinéma, la 3D, ou Guimares.
Le film suivant – Cinesapiens – s’embarque malheureusement dans une cacophonie généralisée, tentant d’asséner de grandes vérités sur la place du spectateur, sur le cadre, etc. Mais rien n’est vraiment dit par l’image, ces phrases sont martelées, elles apparaissent à l’écran ou sous forme de vague jeux de mots visuels. Edgar Pêra n’a visiblement pas compris que la 3D est avant tout une expérience visuelle…
Et c’est également le cas de Godard et ses 3 désastres, qui monte des extraits de ses films, d’archives historiques – notamment une surimpression entre Hitler et Chaplin, qu’on a le sentiment d’avoir vus mille fois dans ses grandioses Histoires du cinéma – mais également (et c’est là le plus intéressant) une image dans une 3D impeccable de deux appareils photos collés l’un à l’autre, visiblement un outil bricolé chez soi pour obtenir de la 3D. Apparaît alors la question du double, de la 3D comme un double du cinéma qui se superposerait sur lui même, qui ne nous ferait pas mieux voir ni mieux ressentir, mais qui nous accorderait de plus en plus avec le cinéma comme un double de plus en plus substantiel du monde et de l’histoire.
Probablement que la leçon à retenir sera celle de Godard, mais de la part de cinéastes solipsistes tels que lui même et Greenaway, on aurait été en droit d’attendre une réflexion sur la 3D venant de la 3D elle même, s’incarnant dans des images qui généreraient une pensée, sans la contenir et la manifester de manière explicite comme ils le font peut être un peu trop. Le comble étant le film de Pêra qui se vautre dans une pesante déclaration d’incapacité à comprendre une forme esthétique.
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