Avec OVNI – un deuxième album réédité sous la forme d’une version Louis XIV – et une tournée en cours, Odezenne est voué à réconcilier le rap avec le grand public. Avec eux, pas de rap plaintif, agressif, le groupe joue avec les mots avec habileté et poésie afin d’offrir une musique sophistiquée, au langage soutenu, aux sonorités jazzy et électro. Ce groupe prometteur du rap français est unique en son genre. Nous les avons rencontrés au Connexion Live à l’occasion de leur concert toulousain le 3 juillet dernier : Alix et Jack à la voix (Pseudo Al et Jaco), Mattia aux instrus (Merlin) et Pierre au scratch (Dj Lodjeez). Disponibles et sympathiques, ils nous racontent leur rencontre. Alix : «Mattia et moi étions en cours ensemble au collège à Bordeaux. Je venais de la région parisienne, lui de Milan. On a fait de la musique ensemble, qui n’avait rien à voir avec le son d’Odezenne, quelque chose de plutôt rock, inspiré de groupes comme The Doors, Jimmy Hendrix, Smashing Pumpkins ou Alice in chains. Cinq ans après, nous avons rencontré Jack et Pierre par des connaissances. La porte d’entrée vers le rap s’est donc faite par eux et l’originalité du groupe vient de ces inspirations diverses. Nous avons donné un premier concert ensemble en 2007 et le groupe est né comme ça. »
Un groupe de scène, Odezenne ? « Je pense que nous avons appris à l’aimer, avoue Jack, mais ce n’est pas ça qui nous rassemble le plus. » Il faut bien, car l’OVNI Tour est un tel succès qu’ils ont du le prolonger avec de nouvelles dates. « Nous avons fait une première tournée entre octobre et décembre 2012, qui avait très bien marché. Nous avions prévu de rentrer en studio mais les échos de nos lives ont fait que notre tourneur a été sollicité. Il nous a rappelés pour nous demander si nous voulions bien décaler de six mois l’enregistrement du nouvel album. Il avait des demandes, une vingtaine de dates. Nous avons dit ok, mais il manquait des grosses villes comme Toulouse. Nous avons lancé « Odezenne à la demande », un événement sur Facebook où le public promet d’assister au concert là où des dates manquent à l’appel. L’objectif est de rassurer les organisateurs et de trouver une salle pour jouer. Ca a très bien marché. Nous avons concrétisé dix concerts supplémentaires. C’est donc un deuxième round de l’O.V.N.I. Tour. »
Les textes d’O.V.N.I. sont très variés, certains assez critiques sur la société. Souhaitent-ils pour autant avoir un discours engagé? « Pas tout le temps, nous répondent-ils. Nous avons des morceaux plus poétiques, plus personnels qui n’engagent personne d’autre que nous. En revanche, comme n’importe quel citoyen, nous avons des opinions et quand on te donne la possibilité de t’exprimer, tu te dois de donner ton point de vue. » Certains morceaux comme Dedans reflètent une vision assez pessimiste de la vie. « Nous n’attendons pas grand-chose de la société actuelle, nous prônons une liberté totale. Nous tapons les personnes qui sont aux manettes. » Alix : « Je pense que nous n’avons pas digéré tout notre optimisme, nous croyons en la capacité des gens à se réveiller. » O.V.N.I. est donc un album réfléchi qui a demandé beaucoup de temps et d’investissement au groupe. « Nous avons enregistré dans un studio appelé Cryogene Prod, anciennement la Grosse Rose, qui était la maison de Fred Vidalenc, le premier bassiste de Noir Désir.Tous les groupes bordelais ont enregistré pendant des années là-bas gratuitement grâce au groupe Noir Désir. Et ces gens-là ont repris la maison. C’est un truc de dingue. Nous avions signé pour 45 jours et nous y sommes restés 200. »
En live, Odezenne produit une énergie contagieuse. Le groupe partage sur scène une belle complicité et une réelle connivence avec le public.Les deux rappeurs manient les mots avec finesse et intelligence tandis que leurs musiciens jouent un son détonant (électro, rock, jazz) par leur complémentarité (guitare, synthé, scratch…). Le morceau TuPu du Cu est parfait pour sauter en concert et Saxophone ou Maux Doux de bons moyens pour s’évader. Ils enchaînent ainsi intelligemment les morceaux d’OVNI en mélangeant certains de leur premier album – Sans Chantilly – avec quelques nouvelles créations, laissant envisager la direction de leur troisième opus qui d’après Alix « sera psychédélique ». Y aura-t-il des collaborations possibles sur cette nouvelle livraison ?La réponse est la preuve qu’Odezenne est un groupe soudé qui reste à part dans sa façon de s’éloigner des codes classiques du rap. « Non, nous n’avons pas prévu de featurings. Pour aboutir à quelque chose qui nous convient, il nous faut du temps. Si nous travaillons avec quelqu’un d’extérieur, cela induirait qu’il reste 3, 4 mois à la maison. C’est compliqué, nous avons besoin de temps et de nous connaître. Les collaborations se font plutôt sur les pochettes et les créations visuelles. » En tous cas, on a très hâte d’entendre la suite.
Un grand merci à Emilien Noiré (IWelcom) et à Mina Forouhar pour avoir permis cette interview et au crew pour leur gentillesse et leur disponibilité
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