LE FILM
A l’écran, le compteur des naissances défile. Les zéros sont signifiés par des carrés blancs : une existence, annoncée à la population par des hauts parleurs qui refusent le silence et favorisent une politique nataliste. Une vie, de la naissance à la mort, du berceau à la barquette de viande hachée avec entre les deux un jeu qui impose sa règle : la loi du plus fort, bouffer ou se faire bouffer. La mère de Philippe le sait, elle raconte à son fils la fable de la maman ourse qui abandonne son fils pour qu’il s’endurcisse à l’épreuve des éléments et se suicide en se jetant du balcon de sa barre HLM. Le jeune orphelin grandit dans une institution en apprenant à « jouer », donner des coups plutôt que d’en recevoir, ne pas finir dans un body bag. Il rencontre Marie, qui le sauve de la pendaison, le couple se marie. Lui devient le cadre implacable et froid d’une société pour laquelle il fait passer des tests absurdes, soumet aux postulants des jeux psychologiques inouïs de violence, humiliants, qui nient toute notion d’humanité à la personne. Elle déteste ce que Philippe est devenu mais au sein de ce couple devenu silencieux, ce même silence refusé par la société, l’amour est toujours là, il se lit dans les regards, ne veut pas renoncer. Carré Blanc est l’histoire de cette amour, plus fort que cette société qui nie le bonheur.(LIRE LA SUITE)
LE DVD
Carré Blanc arrive dans une édition dépourvue de tout bonus, hormis la bande annonce et une galerie de photo pour assurer le minimum syndical. Jean-Baptiste Leonetti s’en explique dans notre interview : il ne voulait pas proposer de suppléments au rabais, n’ayant pas eu le temps ni l’argent pour produire un documentaire digne de ce nom. Dans ces conditions, le dvd édité par M6 Vidéo remplit sa fonction première : permettre aux spectateurs de découvrir le film, le faire sortir de l’anonymat dans lequel son exploitation technique en salles l’avait plongé. Une seconde vie pour un film qui en aura certainement plusieurs, qui demande du temps pour être apprécié – passé le choc initial -, des visions répétées pour en explorer les richesses. Techniquement, le transfert proposé ici rend justice au travail photographique – couleurs grises et glacées – et à la composition géométrique du cadre. D’un point de vue sonore, les deux mixages proposés en 2.0 ou 5.1 permettent d’apprécier l’énorme travail fourni sur les textures qui mélangent des messages gouvernementaux diffusés par hauts parleurs, des bruits de jungle, des émissions radios sur le croquet, des airs de boss nova. Tout cela produit une atmosphère hautement anxiogène qui ajoute à l’impact du film sur le spectateur. Mine de rien, Carré Blanc a tout pour devenir un film culte : ce dvd pourrait être la première étape de son accès à ce statut dont peu de films peuvent aujourd’hui se prévaloir.
Carré Blanc, dvd disponible (M6 Vidéo)
Note: