Si Terrados prend racine dans la réalité de la crise économique espagnole d’aujourd’hui, il n’en sombre pas pour autant dans les travers d’un cinéma dit «social», avec son cortège d’écueils misérabilistes. Au contraire, la bonne idée du film, plutôt que de raser le sol de façon complaisante, est de prendre de la hauteur, de lever les yeux et de faire une pause au soleil sur les terrasses des toits barcelonais. Le générique est à ce titre significatif : tandis que la radio déverse son lot d’informations sur les chiffres du chômage et le pouvoir d’achat des ménages, une petite bande de trentenaire grimpe en haut des immeubles pour dérouler la paillasse et sortir les canettes de la glacière, les pieds en éventails. Certains ont un travail, d’autres sont au chômage, mais tous profitent de ce répit salutaire pour faire le point sur leurs vies, leurs envies, tisser des liens d’amitiés ou trouver l’amour. Dans ces instants-là, le film est lumineux, aérien et assez inoffensif.
C’est quand il cesse de prendre la tournure du film choral pour se concentrer sur un seul personnage principal que Terrados devient réellement intéressant. Leo est un juriste au chômage qui ne sait plus s’il veut de nouveau intégrer un autre cabinet d’affaire. Son questionnement professionnel remet en cause sa relation avec sa compagne, qui lui reproche de se laisser pousser la barbe et ne rien faire de ses journées. Le film glisse alors sur les difficultés de la middle life crisis, cette période de la vie où on se pose des questions sur ses valeurs, son travail, ses relations. Demian Sabini, qui réalise le film et interprète Leo évite la complaisance ou le manichéisme, même si le choix vient à se poser entre «faire des sous» et s’acheter une grosse voiture ou travailler la terre de ses mains dans une coopérative agricole. Leo finit par trancher avec panache et humour dans une parodie d’entretien d’embauche où il se moque des costumes-cravates dont il ne veut plus faire partie.
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