Il faudra se résoudre à considérer que Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre est la seule bonne adaptation des bande-dessinées d’Uderzo et Goscinny. Pourtant, le film d’Alain Chabat – d’une fidélité scrupuleuse au matériau d’origine – avait été très décrié pour son esprit canal, réunion de happy fews de la chaîne payante à l’humour décalé très codifié. Si la critique est compréhensible venant de non initiés, elle n’est que partiellement exacte, car sous couvert de gags non-sensesques et de parodies faisant référence à la culture populaire, l’ex-Nuls réussissait tout de même à perpétuer l’aspect grand public et surtout bon enfant des BD. Alain Chabat, en gamin sur le tard, se faisait manifestement plaisir à recréer avec ses potes de comédie un univers dont il est proche et nous faisait plaisir aussi. Le public ne s’y était pas trompé, réservant au film un véritable triomphe mérité au box office. Réussite qu’il ne parviendra à égaler que partiellement avec Sur la piste du Marsupilami, cette année.
On voit bien que Laurent Tirard aimerait bien systématiser une telle formule gagnante avec Astérix et Obélix : Au service de Sa Majesté, mais lui ne semble pas posséder la recette de la formule magique ou n’est pas tombé dedans quand il était petit. Son film, s’il échoue à convaincre, n’est cependant pas la catastrophe que l’on anticipait. Loin d’être honteux, certes, mais hésitant et surtout, très paresseux. En voulant adapter deux BD – Astérix chez les Bretons et Astérix et les Normands – le film ne parvient jamais à trouver son rythme et a bien du mal à faire le lien entre les deux narrations au sein d’un même récit. D’où des chutes de rythme un peu gênantes dans le cadre du genre de la comédie qui ne souffre pas d’être mal cadencé. …Au service secret de Sa Majesté ne sait pas non plus sur quel mode de l’humour se situer : entre les bonnes grosses vannes bien gauloises et les références implicites, il n’est pas certain que les petits comme les adultes y trouvent leur compte. On se demande même si après la parodie de Kill Bill et celle d’Orange mécanique, le clin d’œil à 300 est volontaire ou non.
Heureusement le film a quelques arguments pour convaincre, à commencer par une direction artistique qui rend justice à l’univers coloré de la BD, malgré des effets spéciaux qui font toujours autant pitié. Les plus petits auront sans doute du mal à reconnaitre en Edouard Baer l’incarnation de l’Astérix dessiné qu’ils connaissent. L’acteur est en roue libre, à peine dirigé, il ne s’éloigne pas du registre familier qu’on lui connaît. Le gimmick «C’est fou l’énergie de cette ville» demeurera obscure à nos chères têtes blondes comme ces allusions à l’homosexualité supposée des deux gaulois. Si Valérie Lemercier, Fabrice Luchini et Dany Boon ont l’air visiblement de beaucoup s’amuser, Catherine Deneuve est en revanche totalement hors de propos en Reine d’Angleterre à l’accent surfait. C’est le problème d’un casting qui joue systématiquement sur les seconds rôles de luxe (Gérard Jugnot, Jean Rochefort, les BB Brunes…) sans souci de réelle cohérence, tout comme les thèmes qui sont brassés pêle-mêle dans un chaudron. On ne peut pas reprocher au film de vouloir parler de l’amour, de l’amitié ou du courage, encore faudrait-il le faire avec une recette qui serait moins indigeste.
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