Le vingt-cinquième anniversaire des Inrockuptibles au Bikini commence avec une très belle découverte, de celle dont est encore capable l’hebdomadaire d’Audrey Pulvar, qui a été l’un des seuls media en France à avoir remarqué et défendu le premier album de Poliça. Ce qui interpelle d’emblée, c’est la voix de la chanteuse, Channy Leaneagh, quelque part entre Björk et Tracy Thorn d’Everything but the girl. De quoi affoler les charts et les radios si le groupe avait choisi la facilité des tubes et de l’auto-tune systématique. Au contraire, la musique de Poliça se situe dans une sorte de paradoxe : à la fois obscure et lumineuse, complexe et évidente, on pense à Portishead et à Leila dans une tentative de définition de cette matière belle et étrange que produit le groupe. La chanteuse balances des beats sur son séquenceur et danse comme un petit lutin, le bassiste produit un son très fuzzy tandis que les deux batteurs alternent les frappes subtiles et les solos plus massifs. La soirée commence vraiment très bien avec cet inconvénient que rien dans la programmation qui suit ne viendra égaler ce magnifique moment.
C’est pourtant Electric Guest qui poursuit les hostilités. Le combo californien a manifestement ses fans si l’on croit Asa Taccone, le chanteur qui reconnait dans les premiers rangs des spectateurs qui enchaînent les concerts du groupe. C’est la dernière date de la tournée pour Electric Guest, après un an passé sur les routes, mais il leur en reste sous la semelle. Le chanteur a l’air visiblement d’être monté sur ressorts et bouge comme une anguille, il déploie une énergie qui se communique dans le public, ravi. Notre voisine nous souffle que la voix haut perchée d’Asa Taccone évoque le souvenir de Mika, ce n’est pas faux. Elle trouve qu’il surjoue le côté euphorisant, c’est vrai aussi. Le groupe enchaîne les titres de son premier album, qui sont désormais des tubes repris dans la publicité et les émissions télés, dans une forme de synthèse entre l’electro pop, la soul et le rock californien. La section rythmique est ronde et chaloupée, idéale pour danser, le groupe joue un nouveau titre – Holiday – et reprend Little Dragon. Si ce n’est pas vraiment notre tasse de thé, on ne peut nier une certaine efficacité à Electric Guest qui rencontre ce soir encore un joli succès.
Changement total d’ambiance avec l’arrivée de The Vaccines pour clôturer la soirée. Après les looks d’hipsters d’Electric Guest, place aux barbus à cheveux gras et au punk rock joué pied au plancher. Justin Young, le chanteur, nous dit avoir bien profité de leur day off à Toulouse la veille et être là pour faire la fête. L’ambiance est effectivement instantanément festive dans le public dès l’entame du concert, ça pogote sévèrement dans les premiers rangs, ça sent la sueur et la bière tiède. Le groupe ne fait pas dans une quelconque forme de subtilité, non. Les morceaux recherchent une efficacité rock , très courts, imparables dans leur genre à défaut de convaincre réellement. La basse est très lourde, le guitariste tombe à genoux quand il joue ses solos, le son est plutôt gras. Il ne faut pas faire la fine gueule, c’est de la musique fast food , assez calorique, qui comme le McDo nous reste un peu sur l’estomac, relativement indigeste. On se demande ce qui justifie qu’un tel groupe, que les Inrockuptibles sont les premiers à pourfendre sévèrement, soit à l’affiche du festival.
Photos : Frédéric RACKAY (tous droits réservés)
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