George Clooney fait son retour derrière la caméra en portant à l’écran l’aventure des Monuments Men, sept hommes, conservateurs de musées, historiens d’art, universitaires, qui lors de la Seconde Guerre mondiale revêtirent l’uniforme pour sauver des œuvres pillées par les Nazis. Ce pitch laissait promettre une trépidante chasse au trésors, mais autant dire que le résultat en est loin.
Clooney a réuni un casting de « gueules », incluant lui-même, ainsi que des acteurs possédant chacun dans leur genre un fort potentiel charismatique: Bill Murray, Matt Damon, John Goodman… Ils sont bien les seuls à donner un peu de caractère à cette aventure remarquable de fadeur. A cette bande vient s’adjoindre Cate Blanchett dans le rôle de Claire Simone, française historienne d’art engagée dans la résistance, et autant dire que le scénario n’hésite pas à lui associer quelques clichés chers aux américains.
Nul ne soupçonnait George Clooney d’être un génie du septième art, lui qui nous avait habitué, en tant que réalisateur, à d’honnêtes livraisons telles Les Marches du pouvoir. Autant ce précédent film ménageait-il quelques belles séquences jouant des codes du film noir, autant dans Monuments Men, l’absence de panache et de fougue se fait plus que jamais problématique. Le plus frappant, c’est combien l’enjeu principal, le sauvetage des chefs d’œuvres allant de Van Eyck à Picasso, se trouve minimisé et peu mis en valeur. Dans le rôle de Franck Stokes, leader des Monuments Men, Clooney livre deux fois face aux décideurs un discours tout en dignité sur combien l’art constitue notre héritage, et pourquoi il vaut la peine que des hommes se battent au péril de leur vie pour le préserver, etc. Tout cela est certes juste, même si cette vision sonne comme fort muséale et réduisant les œuvres à des beaux objets à entasser dans les galeries, pour ensuite aller les admirer avec un respect poli.
A l’inverse, dans Les Aventuriers de l’arche perdue, Steven Spielberg lançait Indiana Jones, l’archéologue aventurier, sur les traces d’antiquités dérobées également par les Nazis et n’hésitait pas à basculer franchement dans le fantastique, donnant le tout pour le tout. C’est le parti pris opposé qu’adopte Clooney, et, tout empreint de respect de vérité historique, il y a fort à douter qu’il ait seulement songé qu’en dévier pour verser dans plus de panache voire de grand-guignol eut été envisageable. Le film s’ouvre d’ailleurs sur un carton nous annonçant que le récit est tiré d’une histoire vraie. Certes, mais ça ne justifie ou n’excuse rien. Un bon film se suffit à lui-même sans devoir recourir à ce type de légitimation qui n’ont franchement rien à voir avec le cinéma. A l’opposé également, la volonté d’un Tarantino d’ignorer la vérité historique et même d’aller contre elle témoigne d’une foi dans les pouvoirs du cinéma totalement absente ici. Aussi Clooney fait-il ici de l’art un enjeu comme un autre, peu mis en valeur, et le film se laisse dès lors voir comme un film de guerre paresseux, accumulant les situations déjà vues. Les œuvres sont d’ailleurs filmées de manière indifférente, sans produire d’éblouissement ou de choc quand la troupe réussit à remettre la main sur l’une d’elle, les soldats réagissant comme des enfants qui auraient retrouvé des œufs de Pâque. L’humour est bien présent et le film ne se défait jamais de sa bonhomie, mais cela ne le sauve pas de l’ennuie, et révèle surtout combien Clooney réalisateur n’a pas réussi à prendre la mesure de son sujet.
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