Cette deuxième soirée au Fort St Père aurait pu afficher complet sans le désistement à la dernière minute de Bjork. Annoncée en tout premier et comme une victoire par le festival, Bjork représentait une véritable tête d’affiche, puisque c’était pratiquement sa seule date en France. Mais suite à ce revirement de situation, ils étaient nombreux les billets du samedi, à se retrouver sur Leboncoin. En annonçant dès le lendemain le remplacement par Foals, François Floret, le directeur de Rock Tympan a rassuré tout son monde, voire l’enthousiasmer encore plus. Au final, la soirée réalise une belle performance pour la Route du Rock avec environ 11 000 entrées.
Mais en attendant, revenons en à nos concerts du jour. Nous retrouvons le site presque asséché, mais pas tout à fait encore propice aux baskets… Sur la scène du Rempart, s’approche déjà Only Real, le petit frère de Mac Demarco. On l’attendait avec sa traditionnelle casquette, mais finalement il a préféré dévoiler sa chaude chevelure rousse. Plaisanteries mises à part, il faut avouer que Naill Galvin a fait de son passage à St Malo quelque chose de très plaisant et de plutôt bien travaillé. Placé à un horaire difficile, il lance idéalement cette journée en récitant ses recettes gagnantes comme Cadillac Girl, balade imparable avec ce phrasé qui lui confère une aura particulière. Les chansons comme Yesterdays ou Can’t get Happy, assureront la suite avec la même efficacité. Mais il faut avouer que le reste de l’album Jerk At The End Of The Line sorti en mars 2015, reste sur une ligne directrice plutôt joviale et qui permet à tout festivalier de passer un bon moment. Ceux qui n’attendaient rien d’Only Real en seront sans aucun doute ressortis avec l’envie d’aller plus loin.
De l’autre côté du site, sur la grande scène, c’est une autre ambiance qui prend place, mais pas du tout moins plaisante , Kiasmos, les seuls représentants de l’Islande de l’édition ont malheureusement pâti de l’annulation de leur compatriote et ont été contraints de passer sans doute un peu tôt dans la journée. Cela dit, la fin de journée n’était pas déplaisante à l’écoute de cette électro minimaliste. Composé de Janus Rasmussen et de Olafur Arnalds, ils sont bien seuls derrière leur platine, sans aucune mise en scène et vu l’horaire, sans jeu de lumière. Mais les deux ne se démontent pas et parviennent malgré une musique plutôt calme et planante, à faire bouger les têtes tranquillement. Au fur et à mesure que les chansons s’enchaînent, les Islandais se libèrent davantage rassurés par un public réceptif. L’album éponyme sorti en 2014 ne contient pas de tube réel, même si on peut citer Looped qui est une belle réussite. Swayed également est intéressante, grâce un son récurrent assez original et bien porté par les notes de synthé, notamment. Une jolie surprise, car on n’attendait pas vraiment les Islandais à ce niveau-là.
Sur la scène du Rempart, l’ambiance reste inchangée. La fraîcheur et la gaieté laissés par Only Real sont toujours présentes et les jolies jeunes filles espagnoles qui se présentent maintenant sur scène ont la ferme intention de les maintenir et à les sublimer. Hinds qui a fait sensation après un simple EP, est une pièce de choix dans la 25ème édition de la Route du Rock, en tout cas sur le papier. Les Espagnoles sont visiblement heureuses de se produire et le font remarquer. Tout au long du concert, elles tenteront de communiquer avec le public, leur difficulté en français ne tardera pas à séduire les bonshommes de la fosse. Toutes les sirènes ne méritent pas qu’on les ignore et il serait dommage de se priver de celles qui forment Hinds. Leur musique qui sonne un peu sixties n’est pas sans rappeler les Allah Las déjà passés par St Malo, il y a deux ans. Nous n’avons pas eu la chance d’écouter grand-chose des Espagnoles avant le concert, mais le concert se passe sans surprise et de façon assez naturelle. Sans doute un peu trop pour nous transcender outre mesure. La naïveté est amusante, mais connaît aussi ses limites. Le concert reste à notre goût un peu plat, mais on attend de connaître la suite pour Hinds.
La suite va s’avérer l’un des meilleurs concert du week-end. De retour sur la grande scène, c’est avec un peu d’appréhension qu’on retrouve le talentueux Luis Vasquez et son groupe ténébreux The Soft Moon. De l’appréhension, car il fait jour et que la musique sombre et difficile se prête davantage à la nuit noire ! Et les doutes restent présents dans les premières minutes. L’intransigeance du son Soft Moon n’est pas facile à imposer à un public plutôt en mode hippie jusque-là. Cependant, petit à petit, l’intérêt est grandissant. Déjà auteur d’un concert grandiose il y a maintenant trois ans sur cette même scène, The Soft Moon joue presque à domicile. La nuit tombant, on voit en plus sortir petit à petit les spots et les visages disparaître au profit de silhouettes plus ou moins articulées ! Et le public ne s’y trompe pas, le voilà complètement concerné. Les nouveaux morceaux de l’album Deeper sont bien évidemment de la partie, Black ne laisse pas de place au doute, Wrong est quant-à elle plus directe. Mais des chansons plus anciennes et qui ont fait la réputation des Américains sont aussi de la partie, comme Circles, immédiatement reconnaissable ou encore Parallels dont la filiation à Joy Division n’est pas loin. On regrette encore une fois la disparition de la setlist de When It’s Over qu’on avait tellement aimé entendre en ce même lieu. Luis Vasquez toujours aussi incarné par son propre son, livre une nouvelle fois un concert grandiose. Il est plus aisé d’écouter Soft Moon en concert qu’en album et ça ne fait aucun doute.
Le terrain est largement déblayé pour les petits nouveaux de Spectres qui jouent dans une catégorie assez proche. D’une approche beaucoup plus noisy garage, le groupe est davantage énergique et bruitiste. Présentant son premier album Dying sorti en début d’année 2015, les Anglais vont nous en mettre plein les oreilles à coup de distorsions et de murs de son sans fin. Relativement engagé, c’est la lassitude qui nous gagne petit à petit. Il faut dire que niveau larsen, on déjà bien été nourri la veille… La jeunesse du groupe ne facilite pas non plus l’approche et à vrai dire, lorsqu’on prend un peu de recul sur la soirée, ce n’est pas le concert qui nous aura marqué le plus. Encore une fois, nous avions sans doute misé un peu trop sur les petits nouveaux dont on attendait beaucoup.
Alors retournons voir des valeurs sûres ! C’est l’heure de la grand messe, l’heure des retrouvailles avec Foals, pour une troisième participation à la Route du Rock. Invités à la dernière minute, il en faut plus pour déstabiliser les Anglais qui depuis leur premier passage ont pris du galon. L’invitation tombait à point nommé puisqu’il étaient fin prêts pour présenter son nouvel album qui sort en cette fin du mois d’août 2015. Cependant, on a bien cru qu’on allait passer au traver lorsqu’Alban Coutoux, programmateur du festival, s’avançait sur scène pour annoncer que le bassiste Walter Gervers était tombé malade le jour même. Il ne laissera pas les gens comprendre en annonçant qu’il pouvait être remplacé et que Foals pouvait assurer l’ensemble du concert. Une sorte de malédiction. mais elle n’ira pas au delà. D’ailleurs, Foals ne perdra pas de temps en attaquant d’entrée par une nouvelle chanson, Snake Oil, qui vraisemblablement ouvrira l’ensemble de sa prestation sur cette tournée. Idéale pour une introduction musclée, elle semble indiquer la teneur du prochain opus, dont on a hâte de découvrir l’ensemble des titres. Yannis Philippakis prendra la parole pour parler gentiment de Bjork et le show commence alors. Le superbe titre Olympic Airways indique qu’il n’y aura pas que de la nouveauté et ce n’est pas plus mal, tant les titres de Foals sont forts. Les tubes My Number et Inhaler côtoieront des chanson puissantes comme Providence ou la nouvelle What Went Down. Foals déroule avec classe et maîtrise. Le public s’en réjouit et le montre. Pour calmer tout cela, la magnifique Spanish Sahara imposera un calme impressionnant au beau milieu du concert, Late Night quelques instant plus tard fera de même. Foals semble au sommet de son art, Mountain At My Gates, autre nouveau titre joué ce soir démontre qu’on n’a pas fini de s’étonner avec les Anglais. Le finish reste fidèle à ce qu’ils ont déjà fait par le passé en utilisant Two Steps, Twice parfaite pour faire durer le plaisir et déchaîner les passions. Au final, le concert est passé d’une traite, tellement vite qu’on était vraiment frustrés. Il y avait pourtant tellement de chansons en réserve, comme les The French Open, Miami ou encore Cassius. Sans doute la marque des grands…
Passé ce grand moment, Il a fallu du courage à Daniel Avery pour se présenter sur scène. Vraisemblablement très attendu, il faut dire que très rapidement l’Anglais parviendra à nous endormir sérieusement. Sa musique monocorde n’arrivera pas à nous convaincre tout comme son manque de mise en scène. Quoi de plus ennuyeux que de voir un type derrière des platines et qui se dandine à peine ? On passera très vite notre tour, mais lui, restera apparemment plus longtemps que prévu.
Et pour finir la soirée, Il ne faudra pas beaucoup d’efforts à Lindstrom pour nous remettre sur pied. Auteur d’un show pas beaucoup plus mis en scène que son prédécesseur, il sera par contre beaucoup plus convaincant. Pour dissiper tout doute, sachez qu’il n’est pas Islandais mais Norvégien ! Et on sent bien qu’il a de la bouteille. Sa musique plus enlevée et surprenante, nous offre une fin de soirée idéale. Il aura su relancer un public largement plus dispersé que deux heures auparavant, mais qui semble prendre du plaisir sur les variations de Lindstrom. Son set, lui aussi un peu court, nous permettra d’aller faire de jolis rêves…
Note: