Le troisième et dernier jour du Pitchfork Music Festival de Paris est traditionnellement plus festif (la soirée dure jusqu’au petit matin) et fait place aux artistes les plus « mainstream » de la programmation. Un terme à mettre avec des guillemets donc, cependant il fait preuve d’un versant plus Pop de la musique Indé en générale. Outre le grand retour de M.I.A. à Paris malgré un album faiblard, certainement à même de remplir un Zénith ou encore l’Accor Hotel Arena, on aura eu la chance de voir à l’œuvre deux de ses héritières (la britannique Banzai et l’américaine d’Altanta ABRA, toutes les deux très rafraichissantes) et qui ont notamment prouvé que la R’n’B teintée d’Electro et de sonorités World et Pop de la chanteuse culte de Paper Planes pouvait s’en aller sereine de la scène musicale.
Cela explique peut-être l’acharnement médiatique qu’a subi M.I.A. après son concert loin d’être excellent, ce samedi soir. Déçus de ne pas avoir eu droit à des adieux ultimes dignes de sa gloire d’antan, les critiques ont allumé la diva à tour de rôle. Pourtant, vu d’en bas, au sein de la fosse, la belle Anglaise d’origine Sri-Lankaise a fait le set qu’il fallait, entre tubes interplanétaires qui fourmillent dans sa discographie (Paper Planes donc, mais aussi Bamboo Banger, Bad Girls, Bring The Noise et surtout Galang) et les quelques bons morceaux de AIM. Si la politique fut hélas laissée de côté pour une artiste aussi polémique, on aura apprécié ce show d’entertainer qui change dans un cadre si propice aux hipsters.
En plus de ses trois beaux concerts sous le signe du féminin triomphant – ABRA en tête et son set osé, seule face à un public n’attendant que M.I.A. – d’autres célébrèrent le même sexe dans des genres tout à fait différents. L’Indie Rock un brin psychédélique du quatuor Warpaint par exemple, profita du mariage des voix de ses membres pour nous transporter ailleurs. À souligner cette basse grandiose capable d’élever à elle seule tout un show pas forcément transcendant au premier abord. Tandis que si Minor Victories n’est constitué que d’une seule femme, il doit beaucoup à Rachell Goswell, chanteuse divine de Slowdive, qui transforme les monotones titres de ce super-groupe (composé aussi de musiciens de Mogwaï et Editors) en instants de stase sonore.
Mais l’énergie et la sueur masculine avait aussi leur place lors de cette dernière soirée. Tout d’abord via le Hip Hop conscient et percutant de Joey Purp (ami et membre du crew de la star montante Chance The Rapper) et ensuite à travers le set enchanteur et mélodieux de Whitney et de son chanteur-batteur à la voix angélique teintée de Soul. De leur Indie Rock précieux et cool, on passait aux énervés et intenses de Shame. Groupe de Post-Punk encore inconnu de ce côté de la Manche, ils ont pourtant fait preuve d’un charisme sans précédent pendant le festival et ceci malgré une foule apathique, peu encline aux pogos et autres slams – qu’a même initié le chanteur. Certainement le live le plus ébouriffant du Pitchfork Music Festival et un groupe à suivre avec attention.
Enfin, le festival s’est peu à peu transformé aux alentours de minuit en un club furieux. Si l’année précédente on nous avait notamment gratifiés de la présence du grand Laurent Garnier, cette fois-ci, on a pu compter sur plusieurs noms plus ou moins prestigieux, au moins représentatifs de l’héritage du DJ français. Les Italiens de Tale Of Us eurent notamment la chance de clore une nuit folle, plus longue que d’habitude (grâce au changement d’heure) avec un set carré et faisant écho aux grandes heures de la Dance des nineties. Tandis que Motor City Drum Ensemble et Acid Arab offraient un pendant plus orientalisant ou funkysant de cette décennie mythique de la culture Club et Rave. Mais le chef d’œuvre de la nuit restera le set de Daphni, l’autre projet du londonien Daniel Snaith, davantage connu pour Caribou, mais qui balançait ici des vagues de beats et nappes synthétiques électrisantes transportant tout un amas de corps dansants et déchaînes vers l’aube.
Note:
Crédit photo : Alban Gendrot