Avec La Science des Rêves, Michel Gondry était allé au bout de sa logique d’auteur-bricoleur, poussant son propre système de fabrication dans une impasse un peu gênante où l’on avait plutôt l’impression d’assister à une auto-analyse du bonhomme plutôt qu’à un acte de partage en direction du spectateur (ce que tout bon film devrait être). Scénario inspiré de faits personnels, tournage sur les lieux mêmes de son adolescence, atermoiements amoureux pénibles en guise de scénario, La science des rêves nous amenait à nous demander si de l’onirisme ou de l’onanisme, Michel Gondry avait vraiment fait son choix. Face à une telle posture, nous n’attendions pas Soyez sympas, rembobinez avec un enthousiasme exagéré, d’autant plus que le film faisait a priori du système D cher à Gondry le sujet central de son histoire. Autant l’avouer tout de suite, nous nous étions trompés : Soyez sympas, rembobinez est une magnifique déclaration d’amour au cinéma en même temps qu’une comédie sociale dont se dégage un esprit communautaire réjouissant en ces périodes d’uniformisation des esprits et des modes de consommation.
Le principe de départ, retourner les classiques de vidéos-clubs avec une caméra bon marché et les moyens du bord, s’il procure certains des meilleurs moments du film, n’en est cependant pas l’élément central, contrairement à ce que l’on aurait pu imaginer. Certes, voir Jack Black et Mos Def recréer la scène de la bibliothèque de SOS Fantômes, avec du fil de pêche pour figurer les livres volants et des guirlandes multicolores en guise de laser, est un véritable régal. Il y a un plaisir spontané manifeste dans la re-création de ces films dits «suédés» (synonyme de «remake» dans le film) mais aussi une charge critique lorsqu’il s’agit de pointer l’humour raciste et la condescendance de Miss Daisy et son chauffeur. Le film est surtout un hymne à la liberté, la créativité, la générosité et la solidarité à la sauce YouTube mais aussi un hommage vibrant au cinéma comme art populaire et fédérateur.
Gondry injecte en effet un discours politique dans sa farce, mais sans jamais que son film ne tourne au pensum pontifiant. Il glisse quelques idées bien senties sur l’indépendance et le collectif face à la puissance des grands groupes (la destruction des cassettes vidéos au rouleau compresseur !), du commerce de proximité face aux grandes chaînes (Danny Glover qui espionne le mode de fonctionnement des grands vidéos clubs pour en adopter le modèle), sur l’obsolescence programmée des accessoires hi tech (le format Dvd déjà dépassé par la haute définition, qui ira sans doute vers une dématérialisation des supports quand les constructeurs le voudront), sur le retour aux racines comme élément fédérateur face à la globalisation des idées et des esprits (le tournage d’un film sur la figure mythique d’un jazzman soude la petite communauté). Dans cette joyeuse fantaisie sociale et pas si utopiste que ça, qui se conclue dans un final à la Capra, Jack Black prouve une nouvelle fois qu’il est l’acteur le plus cool au monde.
Soyez sympas, rembobinez – Disponible en dvd et blu ray (Europacorp)
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