Arrêt demandé – Rien n’est plus embarrassant qu’un dispositif – cinématographique ici – qui se voudrait spontané et naturaliste et qui au contraire ne cesse d’exposer ses ficelles, ses rouages et ses mécanismes. C’est le cas de The we & the I, le dernier film de Michel Gondry. Les jeunes acteurs n’y sont pas pour grand-chose. Tous amateurs, pour la plupart excellents de vérité et de dynamisme, on n’a effectivement pas l’impression qu’ils jouent des rôles mais qu’ils donnent davantage à voir de leur propre existence, de leur personnalité, avec beaucoup de pudeur et de justesse. Le film qui observe leur langage, leurs modes de communication, leurs rires et leurs angoisses est à ce titre une photographie assez exacte de cette génération, celle du hip hop et des SMS, de YouTube et des smart phones.
Là où ça coince, c’est dans le système mis en place par Michel Gondry. Le motif du trajet en bus n’autorise ni pause ni mouvements extérieurs si bien que le spectateur est obligé de subir une logorrhée verbale ininterrompue, parfois drôle, souvent futile, en tout cas qui ne permet jamais le silence dans sa première partie. Michel Gondry ne peut en outre pas s’empêcher d’apposer sur le métrage sa trademark de réalisateur/bricoleur assez agaçante en sortant son matériel de papier crépon et de miniatures inappropriées en la circonstance. Mais là où le film devient vraiment gênant, c’est dans sa façon totalement artificielle et mécanique dont il opère une rupture de ton dans le dernier acte, sa manière de basculer de la frivolité à une émotion factice et sursignifiée, du collectif (the we) à l’individuel (the I). Au fur et à mesure où le bus se vide, on passe d’un débit verbal de mitraillette à des tunnels de dialogues un peu embarrassants. C’est par où la sortie ?
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