Difficile d’aborder un concert avec des a priori. Que ces derniers soient positifs ou négatifs, le chroniqueur doit aussi savoir faire fi des sensations déjà perçues pour se concentrer sur le présent entendu.
Dès lors on peut se confronter à des sentiments antagonistes : la confirmation ou le questionnement, la satisfaction de ne pas s’être trompé ou la sensation équivoque d’être passé a coté de quelque chose… C’est donc toujours en essayant de trier ces différentes images sonores que je tente d’écrire cet article.
Place de mon cœur titre phare du nouvel album, Foule Monstre, ouvre naturellement les festivités. Ce dernier incarne parfaitement la tendance du 5ème opus : un rock accessible doté de mélodies collant au crâne et agrémenté de sons électro. D’autres morceaux comme Libre, Milliardaire ou encore Chamade, joués aussi ce soir, sont de cette mouvance.
La frontière entre accessible et facile peut être ténue. Mais si vous ajoutez à cela la texture de voix plutôt fraîche et sans aspérité de Romain Humeaux – qui appartiendrait plus à la famille d’un Damien Saez que d’un Baschung -, on pourrait entendre poindre au loin l’ombre menaçante de la variété sur certains morceaux…
Autre élément à charge ce soir au Bikini : les paroles sont parfois inaudibles. À moins de connaître les chansons par cœur, il est très difficile de comprendre les textes. Dommage pour du rock français.
Mais arrêtons ici les critiques et venons-en immédiatement aux louanges. Car ce fut aussi une très bonne soirée passée en compagnie de ces Bordelais aux coeurs généreux et dont le passé punk-rock a aussi – et heureusement – largement imprégné le set. On citera alors avec une petite pointe de nostalgie les morceaux comme il pleut des cordes, le Cœur Australie ou Hype.
Très difficile aussi de rester insensible à la mélodie entraînante de A tout moment la rue et à sa mise en scène autour d’un public agenouillé avec en son sein, le chanteur exfiltré de la scène.
Mention spéciale pour la prestation énergique et électrique du guitariste Nicolas Bonnière. Dans le groupe depuis 2009 et ancien grateux de Dolly (on ne le criera pas trop fort), «Nikko» sait manifestement fabriquer des riffs aux accents post-rock sachant sonner et dissoner.
Comme le souligne le denier titre proposé, Je voudrais pas crever (adapté d’un texte de Boris Vian), on repart de ce concert avec le sentiment que l’aventure Eiffel ne s’arrêtera pas de sitôt. Le talent et le potentiel sont de mise dans cette encore jeune formation en quête ostensible d’évolution artistique. Attention cependant à ne pas vouloir chercher le succès à tout prix, car comme le dit le vieux sage : «Il n’y a pas de chemin vers la Musique, la Musique est le chemin»…
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