Ambiance calme et tamisée samedi dernier à la Dynamo pour le set de Matt Elliott. Fini les structures drum’n’bass et les circonvolutions torturées de l’époque de Third Eye Foundation. Pour cette tournée qui l’emmènera, entre février et mars, des côtes bretonnes jusqu’aux rivages de la mer Egée, Matt Elliott se produit sur scène en compagnie de trois autres musiciens (guitare, batterie et contrebasse) et laisse une place prépondérante aux chansons de son dernier album, dark folk et envoûtant, Only Myocardial Infarction Can Break Your Heart. Le message est clair : bienvenue au club des coeurs brisés ! Personnellement je ne suis pas membre, mais on m’a quand même laissé entrer…
Assis au centre de la scène, Matt Elliott égrène ses accords à la guitare électro-acoustique alors que bruits et grincements étranges commencent déjà à sourdre des autres instruments. En l’espace de quelques minutes, les musiciens étaient déjà parvenus à faire passer la Dynamo pour une vieille taverne de la côte anglaise avec houle mélancolique rehaussée d’un supplément de brumes. Après une reprise spectrale de I Put a Spell on You, le ton était définitivement donné. Chants de sirènes, sortilèges maritimes, histoires de naufragés. Black Heart Procession tessiture Leonard Cohen. Des sortes de chansons de marins et de coeurs chavirés lardées de maëlstroms électriques et de rafales free jazz. Le batteur faisait sonner ses peaux et ses cymbales comme les craquements d’un navire en pleine mer tandis que des barrissements étranges surgissaient à coups d’archet de l’énorme contrebasse – étonnamment, elle semblait d’ailleurs elle-même porter sur son ventre les graffitis au couteau de matelots solitaires. Lorsque le groupe nous a embarqués dans une longue version de The Right to Cry, les montées en forme de lame de fond rivalisaient sans problème avec les grandes torsions noise de Ghost ou Semtex ; sous le calme apparent couvait la tempête.
Dans son tee-shirt floqué supergonzo, Matt Elliott avait l’air ravi et le set s’est terminé sur des notes légèrement plus apaisées. Durant quelques minutes encore, sa guitare a divagué entre accords tsiganes et mélodies mariachis pour faire résonner, une dernière fois, les tourments des amants éconduits. Il fallait au moins ça pour nous faire entendre la complainte du marin et du noyé, la petite symphonie des amoureux naufragés. C’est clair, si tu as survécu à la douleur et au naufrage alors seul un infarctus du myocarde pourra te briser le coeur.
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