Ryan Gosling conduisait une voiture dans Drive, avec sa veste brillante ornée d’un scorpion. Dans The Place beyond the Pines, le voilà cascadeur-braqueur, pilotant une moto. Au vu du casting (Eva Mendes, Ryan Gosling, Bradley Cooper), c’était à se demander comment le réalisateur et scénariste Derek Cianfrance utiliserait ces trois acteurs, parmi les plus sexy du cinéma mondial, comment répartir les rôles, comment l’histoire finirait par prendre le dessus sur la plastique ? Qu’importe : Ryan et Bradley remplissent les salles.
Derek Cianfrance réalise un film en trois volets. La première partie évoque la vie de Luke (Ryan Gosling) cascadeur à Schenectady, petite ville perdue des Etats-Unis. Il se produit dans un show spectaculaire « Le Globe de la Mort ». L’homme outrageusement tatoué et peroxydé dégage une simplicité. Il rencontre Romina, une ex-conquête, à la fin du spectacle. Cet échange conduira à une histoire où le cascadeur deviendra braqueur, au prix de quelques frissons. Ce ne sera que dans la deuxième partie du film, qu’apparaîtra Avery Cross (Bradley Cooper), l’idéaliste qui a fait des études de droit et qui est devenu flic. Sa rencontre avec Luke va tout changer. Avery découvrira un monde corrompu où l’ambition est le principal leitmotiv. Enfin, la dernière partie du film s’articule autour des deux personnages, Jason (Dane Dehaan) et Avery Junior (Emory Cohen), qui ne sont autres que les enfants de Luke et d’Avery. Rien ne rapproche ces adolescents pourtant liés sans le savoir par un drame commun.
Avec ce film, Derek Cianfrance démontre l’importance et toute l’ambiguïté du rôle du père, sans tomber dans le cliché. Le choix du triptyque fournit à chaque acteur une place sur-mesure. Ryan Gosling – qui monte en puissance film après film – livre une interprétation époustouflante d’un type dominé par ses émotions, jusqu’à créer une ambiance insoutenable au bout d’une heure, moment de l’apparition de Bradley Cooper qui incarne avec talent cet être rongé par la culpabilité et qui voit sa vie idéalisée se décomposer… Sans oublier Eva Mendes, aux antipodes de ses rôles habituels : sobre mère immigrée mexicaine, serveuse de fast-food sans maquillage. Tout ne résume donc pas à sa plastique. Pour finir, Dane Dehaan (vue dans Chronicle) et Amory Cohen, jeunes acteurs hollywoodiens, marquent avec éclat leur passage dans ce film.
Derek Cianfrance s’est risqué à la réalisation d’un drame psychologique où les protagonistes mis à nu ne cachent rien de leurs tourments et de leurs doutes, aidés en cela par des seconds rôles dignes des premiers. Mention particulière à Ray Lliota (Les Affranchis), qui joue un flic au regard plus menaçant que son flingue.
Road movie générationnel The Place beyond the Pines fait la part belle aux scènes lentes et laisse le temps à la narration. Le champ/ contre-champ des rencontres conforte les individualités et les isolements. Adepte du travelling, Derek Cianfrance l’a utilisé plusieurs fois. Le film commence d’ailleurs par cela et met directement le spectateur en phase avec son personnage, avec son animosité, avec sa tension. Le réalisateur fait le choix de montrer la solitude de ses personnages dans leurs difficultés.
En résumé, une histoire qui tient en haleine, qui mélange violence, joie, suspense et drame sur une très bonne BO de Mike Patton.
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